lundi 3 mars 2014

Désespérance


Etranger- venu d'un lointain pays d'Orient-
Misérable, atrocement seul, abandonné
sur ce quai de Métro pourtant bondé,
recroquevillé, blême, les mains emprisonnées
entre des genoux si maigres, à moitié dénudés.
Que de souffrance sans fin sur ton visage émacié,
que de vide criant dans tes yeux noirs creusés
semblables au gouffre sans fond, à la p'o rte murée.
Par quel enfer es-tu passé? Quelle atroce réalité
t'a déjà à ce point détruit, laminé
alors que ta vie d'homme vient juste de commencer?
Sous quels cieux maudits as-tu croisé le Diable
qui sous prétexte de vouloir leur Bien
a martyrisé, exterminé tes semblables?
Dans quels abîmes es-tu tombé pour percevoir la vérité
à travers les horreurs où tu étais plongé:
qu'en défendant une Cause juste, on peut se tromper?
A quel prix, dans ta lutte pour la Cause, as-tu réalisé
qu'elle était aussi déstructrice, dépourvue de pitié
que celle qu'il s'agissait d'éradiquer?
Combien aimerait-on te venir en aide, te soulager!
Mais la main secourable est retenue, empêchée
par la peur d'être à son tour contaminée
aspirée par l'enchaînement infernal, dése's pérée
qui a fait de toi ce que tu parais - un damné.
Maria Busnot. Paris, novembre 1993.